La Fraternité de l’Anneau : bilan de lecture
Alors que le second volume de la nouvelle traduction du Seigneur des Anneaux par Daniel Lauzon doit paraître sous peu, Tolkiendrim revient pour vous sur le premier : la Fraternité de l’Anneau.
L’an passé c’est aux côtés de nos confrères de l’Association Tolkiendil et d’Elbakin.net que nous avions couvert l’événement : le Seigneur des Anneaux allait bénéficier d’une toute nouvelle traduction riche de plusieurs apports indéniables. En effet celle-ci prend en compte la dernière version du texte anglais, les indications laissées par Tolkien pour les traducteurs et les découvertes apportées par les publications posthumes que l’on doit à Christopher Tolkien. Nous avions dévoilés quelques extraits de l’ouvrage, interviewé Daniel Lauzon et eu la chance d’interviewer en live Vincent Ferré directeur de la collection Tolkien chez les Editions Christian Bourgois. Mais nous n’avions pas partagé avec vous notre bilan de lecture. La parution du second tome nous paraît être une occasion parfaite pour corriger cette erreur. Pour vous donner un avis synthétique nous indiquerons tour à tour, comme si nous répondions à des questions, quel passage nous a marqué, quel chant a notre préférence, si un élément a pu nous déranger ou nous dérouter lors de la lecture et enfin nous vous donnerons notre avis personnel sur la nouvelle traduction.
– – Bilan de Cyril – –
* Passage favori ?
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Au risque de surprendre, mon passage favori a été l’avancée de la Fraternité dans les mines de la Moria. J’ai réellement découvert la majesté des salles des Nains, et l’immensité des cavernes. Les descriptions sont très soignées et permettent de se faire une idée précise des lieux, tout en maintenant l’atmosphère pesante de ces derniers. Le plus étonnant étant que je n’ai aucun souvenir de ces descriptions dans l’ancienne traduction. C’est un des passages qui m’a donné l’impression de redécouvrir la Terre du Milieu, et c’est un sentiment réellement plaisant.
* Chant/poème favori ?
Le travail sur les chants de la nouvelle traduction du Hobbit étant tout simplement bluffant, j’avais beaucoup d’attente concernant les poèmes et les chants de la Fraternité de l’Anneau. Celui que j’avais le plus hâte de (re)découvrir était le poème de l’Anneau, et c’est celui qui m’a le plus plu. On y ressent vraiment l’ombre de mort planant au-dessus de l’Anneau. Simple mais efficace, je n’ai pas grand chose à rajouter à ce niveau.
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* Élément gênant ?
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Même si la traduction est à considérer comme une oeuvre à part entière, il est difficile de faire abstraction de l’ancienne, tellement on la connaît. Le changement de nom m’ayant le plus déplut est celui de Grands-Pas pour « l’Arpenteur ». Pour la simple raison que cela nous prive du jeu de mot savoureux de Bill Fougeron, ce dernier le traitant de « longues guibolles ». C’est un des petits détails qui faisaient le charme de l’ancienne traduction, même s’il n’était pas logique et cohérent de le retrouver ici, je n’en ressent pas moins un manque.
* Avis personnel :
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Un très belle surprise et un redécouverte de la Terre du Milieu, c’est ainsi que je résumerai la Fraternité de l’Anneau. Mais loin d’opposer les deux traductions, je préfère les voir comme complémentaires. Chaque traduction est une interprétation, cela soulève donc de nouveaux aspects. Par exemple, Fondcombe donne une indication de l’emplacement (au fond d’une combe) alors que dans Fendeval, on a une plus grande impression de grandeur. Les deux traductions se valent et mettent en lumière des éléments différents de l’oeuvre du Professeur, et je ne préférerai jamais une à l’autre.
– – Bilan d’Alexandre – –
* Passage(s) favori(s) ?
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Dresser un bilan de cette traduction est une tâche plus ardue que l’on pourrait croire. D’un côté certains éléments peuvent nous sortir de la tête, et de l’autre il nous faut sélectionner UN seul passage de l’ouvrage, mission qui s’avère relativement complexe. On notera d’ailleurs que ce choix est totalement subjectif et ne donne pas forcément à voir la beauté de la nouvelle traduction.
Daniel Lauzon déclarait dans l’interview qu’il nous avait accordée : « J’ai vu Gandalf briller sur le pont » . Cette phrase s’avère assez proche de ce que j’ai ressenti lors du sacrifice de Gandalf face au Balrog. La chute de l’istar dans la Moria est l’un des passages qui m’avait procuré la plus vive émotion lors de ma toute première lecture du Seigneur des Anneaux. Aussi une fois parvenu à cet instant dans la Fraternité de l’Anneau j’ai ressenti la même émotion qu’à l’époque. Tout semblait familier et différent à la fois et j’ai eu le sentiment de saisir bien plus qu’avant la tension de ce passage.
Je dois le concéder, choisir un seul extrait m’est impossible. J’aurai donc la faiblesse d’en mentionner deux qu’il me faut souligner et qui, selon moi, illustrent parfaitement la qualité du travail fourni avec cet ouvrage :
- Le Conseil d’Elrond, par la qualité de ses dialogues – qui rendent perceptibles les différents niveaux de langages des protagonistes – nous ancre dans une forme de proximité et de réalisme, alors que dans le même temps, son ton nous rappelle qu’il ne s’agit que d’un récit lointain.
- Par ailleurs, la finesse des descriptions de la Lothlorien m’y a transporté. Je me souviens notamment avoir ressenti un pincement au cœur lors des adieux de la Dame Galadriel.
* Chant/poème favori ?
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Comme Cyril, mes attentes étaient hautes pour le Seigneur des Anneaux. Et bien elles ont été comblé ! Daniel Lauzon a réussi là où Francis Ledoux avait échoué : il met en lumière la beauté de la poésie de Tolkien. Bien que tous aient suscité mon plus vif intérêt, s’il est un poème que je retiendrai, c’est celui de Beren et Lúthien, chanté par Aragorn peu de temps avant que Frodo ne soit frappé par la Lame de Morgul. Un conseil, lisez les tous !
* Élément gênant ?
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Pour beaucoup de passionnés de Tolkien, l’annonce de la parution d’une nouvelle traduction est immédiatement suivie de deux sentiments : de l’excitation, mais aussi de la méfiance, liée à une forme d’appropriation de l’oeuvre, propre à chaque lecteur. C’est avec la traduction de Francis Ledoux que j’ai découvert Tolkien, il y a des années. Je me suis donc habitué et attaché à la nomenclature de cette dernière – bien que ma préférence aille aux noms dans leur version originale.
S’il est un élément qui m’a parfois déstabilisé lors de la lecture, c’est la découverte de nouveaux termes. A titre d’exemple, l’usage de « Coureurs » à la place de « Rôdeurs » pour désigner les Dunedain m’a quelque peu dérouté. Entendons nous bien, le livre recèle de nombreuses idées brillantes, cependant, le lecteur habitué à l’ancienne traduction peut parfois regretter la disparition de certains noms. Il convient tout de même de garder à l’esprit – c’est d’une importance capitale – que ces changements n’amoindrissent absolument pas la qualité de cette nouvelle mouture. En outre, reprendre la version originale et en comparer les traductions, permet de se rendre compte que les noms qui apparaissent chez Daniel Lauzon sont fidèles à Tolkien, c’est là l’essentiel. Dans tous les cas il ne faudra pas perdre de vue qu l’on ne remet pas en question nos souvenirs de l’oeuvre, on nous propose une nouvelle expérience de lecture, un regard neuf.
* Avis personnel :
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Vous l’aurez compris, moi qui était sceptique à la sortie de la nouvelle traduction du Hobbit, j’ai changé mon fusil d’épaule. Daniel Lauzon donne ici une nouvelle dimension au récit. Grandi, plus fluide et plus riche, ce dernier nous permet de mieux percevoir la force et la puissance du style de Tolkien, en ressort une impression de proximité très nette. Les descriptions, les dialogues – et les nuances qu’ils proposent – renforcent l’impression de réalisme qui se dégage de l’oeuvre. Mais chose tout aussi étonnante, la traduction, tout en nous rapprochant du récit, nous en éloigne en nous rappelant, par son style et son ton, qu’il s’agit là du récit d’une ancienne légende traduite par Tolkien à partir du Livre Rouge de la Marche de l’Ouest (du moins dans son histoire interne).
C’est sans doute là que la nouvelle traduction atteint le plus son objectif : nous donner à voir le récit de Tolkien en français sans perdre ce qui en fait la particularité et l’identité. Entre proximité et distance temporelle, Daniel Lauzon nous permet de voyager en Terre du Milieu et en français s’il vous plait ! En résumé : vivement les Deux Tours !
– – Bilan de Juliette – –
A VENIR
Pour compléter ces bilans de lecture nous vous encourageons vivement à lire ce que Dominique Vigot d’Elbakin.net en a dit. Pour ce faire rendez-vous dans ces deux articles : « Une traduction attendue au tournant pour le Seigneur des Anneaux » et « Compte à rebours avant la nouvelle traduction des Deux Tours ».
– -Mise à jour —
Pour vous procurer le premier tome (la Fraternité de l’Anneau) ou le second tome (les Deux Tours) cliquez sur les images ci-dessous :
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Suis-je le seul à trouver que cette nouvelle traduction est une catastrophe littéraire?… elle s’imposera malheureusement car l’ancienne est désormais censurée par l’éditeur et c’est bien dommage. Juste un exemple : le poème de l’anneau. La nouvelle version est affreuse. Personne n’a osé le dire au traducteur? Certains passages de cette nouvelle version semblent avoir des mots français avec une syntaxe quasi anglo-saxonne. D’autre sont en peine en français correct. Et ce tutoiement généralisé! Gandalf qui tutoie le Balrog 🙁 Une déception absolue! A fuir! Je conseille fortement la traduction de Ledoux en seconde main.
Petite précision : l’éditeur ne censure par l’ancienne traduction à proprement parler. Il a lancé une phase d’harmonisation puisque les différentes oeuvres publiées jusque ici ont été traduites par différentes personnes ce qui a entraîné des disparités parfois importantes. En revanche, le résultat est le même, comme vous l’indiquez, l’ancienne traduction est vouée à disparaître. Elle a ses défauts, mais pour beaucoup (moi y compris) elle a été une porte d’entrée vers la Terre du Milieu et nous est donc familière. J’y reste attaché également…
Sur une autre note, le tutoiement généralisé n’est pas bien différent du vouvoiement généralisé. En réalité, dans cette nouvelle traduction, certains personnages se tutoient et d’autres se vouvoient, marquant la distance de rang qui peut exister entre les uns et les autres. Si on reprend votre exemple, il n’est pas aberrant que Gandalf se permette de tutoyer le Balrog, tous deux sont des Maïar après tout 🙂